« Je suis le bon, le vrai berger… Je connais mes brebis et mes brebis me connaissent comme le Père me connait et que je connais le Père. » et « Je donne ma vie, (pour mes brebis) pour la recevoir à nouveau »
Connaître quelqu’un, dans la Bible, c’est avoir cette relation intime, cet échange d’amour profond et vrai, qui lie, corps et âmes, deux personnes et les fait vivre en se donnant. Jésus, par amour, donne sa vie pour nous faire vivre d’amour envers nos frères. Jésus, lui-même, reçoit cet amour du Père. Jésus se laisse traverser par l’amour du Père qui l’envoie donner sa vie pour nous redonner cet amour qui nous pousse à nous donner à nos frères…
Pour moi aujourd’hui: Je suis émerveillée par la Vie qui nous traverse et qui nous est donnée pour que nous la donnions à notre tour… Vie et amour sont très liés. La vie fait naître l’amour et l’amour fait naître la Vie. Cette vie, des fleurs, et des êtres nous est donnée par Dieu, maître de la Vie. Nous ne fabriquons pas les graines, nous ne faisons pas les enfants, (même si on entend souvent cette phrase, et même si nous manipulons dangereusement les transferts de vie). Nous accueillons seulement et humblement des vies qui nous sont confiées et qui nous dépassent…
Martine Vercambre
Dans cet évangile, Jésus fait appel à nos sens, à nos émotions, à un vécu palpable. Le berger et ses brebis : voici une image qui nous parle, instinctivement, qui vient nous rejoindre dans notre humanité même si nous sommes des citadins dans l’âme. La relation du berger pour ses brebis est chargée d’émotion. J’y vois une brebis fragile, apeurée, qui dépend de son maître et pour laquelle le maître est prêt à tout. L’animal a une relation de confiance totale en son maître et le maître lui consacre sa vie. Tel est le Seigneur, présent à notre porte, en attente de notre confiance. Peuple de baptisés, nous sommes dans l’enclos et malgré nos fragilités, nos faiblesses, nos manquements, nous avons conscience de la présence de notre Seigneur à nos côtés. Mais combien de brebis sont encore hors de l’enclos ? A nous d’être signe, témoins pour que le Seigneur puisse aussi les conduire !
Dans ce passage du bon berger, Jésus n’agit pas comme le berger mercenaire, il entre dans ce plan de Dieu en donnant sa vie pour montrer à quel point Dieu aime l’humanité. Les brebis comptent pour lui. De la plus faible à la plus forte, de la plus jeune à la plus vieille, de la plus agile à la plus malhabile, toutes sont l’objet de son attention et de son soutien. Une image de notre temps serait celle de la bonne grand-mamie ou du grand-papy, toujours alerte qui se penche sur ses petits enfants avec attention et empressement, qui les suit avec intérêt, qui les accueille sans questionnement, qui leur donne du temps etc. comme le font plein de nos connaissances. C’est cela « aimer ses brebis ».
La mission du bon pasteur c’est d’aller vers les brebis qui ne sont pas encore dans l’enclos. Jésus est précis « J’ai encore d’autres brebis, qui ne sont pas de cet enclos : celles-là aussi il faut que je les conduise ».
Le pape François reprend souvent cette idée en nous invitant à aller vers les périphéries ou encore à voir l’Église comme un hôpital de campagne où les blessés de toutes sortes sont accueillis. En effet, Jésus, le Bon Pasteur, ne s’enferme pas dans un enclos. C’est une leçon qui doit nous interpeller aujourd’hui. Devant les difficultés de l’annonce de l’Évangile, il est tentant de se refermer dans la chaleur de l’enclos au lieu d’aller vers l’extérieur comme disciples-missionnaires.
Aller vers les brebis du dehors a toujours été l’une des préoccupations de notre projet paroissial. Aujourd’hui, cette ouverture se manifestera de diverses façons. Elle s’inscrira dans les défis d’aujourd’hui comme la question des réfugiés et des migrants que le pape François soulève à chaque occasion qui se présente pour lui d’en parler et comme tant d’autres défis que nous côtoyons dans nos milieux de vie. « Il y aura un seul troupeau et un seul pasteur ». Jésus nous donne le secret où il puise l’énergie nécessaire à sa mission de bon pasteur: « Je donne ma vie pour la recevoir de nouveau ». Par ce don, il est devenu pour nous « la pierre d’angle ». Recevons cet amour dans la présence de Jésus Ressuscité qui est là au milieu de nous, dans nos rassemblements comme le bon pasteur, le vrai berger. Dans la foi, nous le reconnaissons comme Seigneur et Sauveur : «Viens Seigneur, viens! »
» Voici pourquoi le Père m’aime : Parce que je donne ma vie pour la recevoir de nouveau. » Donner sa vie pour les hommes et la recevoir de nouveau de son Père, voilà bien le secret de l’existence du fils et toute la dynamique du mystère pascal que nous célébrons en ce temps. Le Christ est tout entier tourné vers les hommes ses frères et vers Dieu son Père, rien ne le centre sur lui-même. Les hommes, tous les hommes : le Bon Pasteur veut rassembler en un seul troupeau les brebis de plusieurs enclos, car il est hors de question que certaines se perdent ou soient abandonnées à leur sort.
» Moi, je suis le Bon Pasteur, le vrai berger, qui donne la vie pour ses brebis. » Cette image agraire parle moins à nos contemporains et pourtant dans la bible il en est fréquemment question. Nos ancêtres dans la foi étaient des nomades qui se déplaçaient en faisant paître leurs troupeaux.
« Le Dieu de nos pères » Il est habituellement comparé à un berger dont le troupeau est le peuple d’Israël. Nous pouvons citer par exemple le psaume 22 : « Le Seigneur est mon Berger. » Cette image du Berger dit la sollicitude de Dieu envers son peuple qui rassemble son peuple en souvenir de l’exode, la libération d’Egypte le conduit dans le désert, le nourrit….
« Les Rois, bergers du peuple d’Israël » Le peuple a souhaité avoir des rois qui étaient sensés jouer le rôle de bergers, mais leur attitude n’a pas été irréprochable. Au lieu de faire régner la justice, ils ont laissé s’installer l’opulence pour les uns, la misère pour les autres.
« Jésus, le Messie sera le Bon Berger » Jésus donnant librement sa vie reprend bien le portrait du Serviteur dessiné par Isaïe. Le peuple attendait un Roi qui viendrait sauver son peuple, mais à vue humaine ! Les voies de Dieu ne sont pas celles des hommes ! La prophétie d’Ezéchiel (34,16) se réalisera : il y aura un seul troupeau et un seul pasteur. Le Fils prend la tête de l’unique troupeau pour le conduire vers le but ultime, la Maison du Père. Le Pasteur est aussi le premier à avoir traversé la mort. Il a donné sa vie en toute confiance, les bras étendus sur une croix (son spectre royal), embrassant le monde entier.
Comment répondre à cet amour absolu pour chacun d’entre nous ? À cet appel à se donner ? À trouver notre vocation ? Comme disait Sainte Thérèse : » Ma vocation, je l’ai trouvée; dans le sein de l’Eglise, ma mère, je serai l’amour. » Le pape François donne une définition de la vocation dans Christus vivit (n° 248) : » un appel à la vie, appel à l’amitié avec Dieu, un appel à la sainteté. » Sœur Marie-Valérie Lagarrigue écrit : » Si notre société promeut une culture où chacun développe et donne ce qu’il est en profondeur, si l’ Eglise soutient une culture des vocations en accompagnant chacun sur son chemin de croissance humaine et spirituelle, d’écoute de la parole de l’autre, alors, dans ce terreau vocationnel, germeront des vocations spécifiques à la vie consacrée, au sacerdoce des vocations missionnaires, des vocations au mariage… » Seigneur, donne à notre monde des prêtres, des consacrés, des familles chrétiennes témoins de ton amour. Donne à chacun de nous de vivre avec plénitude ton appel à la sainteté et l’audace de transmettre la joie de l’évangile.
« Nous sommes interrogés aujourd’hui pour avoir fait du bien à un infirme » Actes 4,8. Dynamisé par la résurrection de Jésus , Pierre se sent pousser des ailes . N’en fait il pas un peu trop ! Erreur ou maladresse de débutant dans le trop bien faire. Comme son Maître, Pierre provoque déjà irritations et colère chez les anciens, et leurs questions suscitent à la fois malaise et curiosité. Nous sommes interpellés sur notre façon de faire le bien, nos propres motivations, mais aussi sur nos excès, nos dérapages. L’activisme, l’orgueil, la reconnaissance ne sont pas loin. La parabole du Bon Pasteur tombe à point pour nous éclairer. Dans l’évangile de Jean, elle intervient bien avant la passion, la mort et la résurrection. Jésus ainsi anticipe et annonce son devenir : » Moi je suis le Bon Pasteur, je donne ma vie pour mes brebis, pour la recevoir de nouveau » Jean 10,11-18. Jésus nous interpelle sur sa façon à faire le bien, seul l’amour donné et amour reçu ont toute leur place, et rien d’autre. « J’ai encore d’autres brebis qui ne sont pas de cet enclos » Jn 10, 16. Jésus nous invite vivement à sortir de notre enclos, de notre église, pour aller à la rencontre de nos frères. A la lumière de la parabole, nous comprenons mieux les réactions de ces anciens, nous comprenons mieux aussi les oppositions parfois virulentes de nos jours. Où est l’amour dans tout ça ? Est ce qu’il y en a au moins quand nous faisons le bien ? Alors ne nous étonnons pas ainsi !
« S’il me manque l’amour, je ne suis ………….. J’aurais beau distribuer tous mes …………….. s’il me manque l’amour, je ne suis ……. » 1Co 13, 1. Prions pour toutes les vocations.
Jean-Pierre Ricome